Ouverture jusqu’à 22h et fin du jour de repos obligatoire dans tous les commerces : les propositions de loi qui font bondir les indépendants
La commission Économie du Parlement fédéral planche sur plusieurs nouvelles réglementations pour les commerces.
- Publié le 13-07-2022 à 12h11
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Dans un monde ou l’e-commerce prend une place de plus en plus importante, les commerces physiques doivent s’adapter et trouver de nouvelles formules pour continuer à fonctionner. Du côté politique, on veut également trouver des solutions pour donner de nouvelles possibilités aux commerçants. Ce mercredi, plusieurs propositions sont sur la table de la commission Économie du Parlement fédéral. On fait le point parti par parti.
Du côté du CD&V, Leen Dierick plaide pour que le jour de repos hebdomadaire soit le même pendant une période de 3 mois au lieu de 6 mois actuellement. Elle estime aussi que les communes pourraient être en mesure d'accorder des dérogations pendant 30 jours par an, au lieu des 15 jours actuels. Au PS, c'est Leslie Leoni qui représente le parti. La députée veut soumettre certaines catégories de magasins de nuit à une autorisation communale afin de réduire les nuisances. Elle parle aussi d'une dérogation pour les magasins (> 150 m²) dans les hôpitaux pour s'adapter aux heures de visite.
Mais les propositions qui font le plus parler d'elles viennent du MR et de l'Open VLD. La députée-bourgmestre de Waterloo Florence Reuter ainsi que Benoît Piedboeuf veulent mettre sur la table l'extension des heures d'ouverture générales jusqu'à 22 heures. On parle aussi de déroger au jour de repos hebdomadaire fixe une fois par mois, par unité d'établissement. Kathleen Verhelst (Open VLD) soutient également la possibilité d'ouvrir les commerces plus tard, mais va plus loin pour le jour de repos obligatoire, qui serait simplement supprimé. Enfin, elle plaide également pour la suppression de l'exception pour les dimanches de shopping et les centres touristiques.
Le SNI furieux: "Le même chiffre d'affaires et plus de coûts"
De quoi susciter toute une série de réactions, notamment du côté du SNI, le Syndicat Neutre pour Indépendants, qui a présenté son point de vue lors d'une audition pour les membres de la commission Économie du Parlement fédéral. "Les deux propositions de loi les plus frappantes sont l'extension générale des heures d'ouverture jusqu'à 22 heures et la suppression du jour de repos hebdomadaire obligatoire. Les arguments s'articulent autour du principe de "liberté" : plus de liberté pour l'entrepreneur qui peut organiser ses activités commerciales comme il le souhaite d'une part, et plus de liberté pour le "consommateur moderne" qui veut faire ses achats quand il le souhaite d'autre part. À première vue, tout cela semble bien, mais que signifie cette liberté dans la pratique ?", s'interroge le SNI, qui craint des effets pervers à différents niveaux.
"Tout d'abord, un élargissement des heures d'ouverture entraînera une obligation commerciale d'être ouvert plus longtemps. Vous ne pouvez en effet pas être le seul à fermer vos portes, car cela ferait le jeu de la concurrence. Outre l'argument évident mais important de l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée de l'indépendant, l'aspect financier joue également un rôle important : être ouvert plus longtemps signifie des coûts de personnel et d'énergie plus importants, détaille le syndicat. La question est de savoir si cela est compensé par un chiffre d'affaires supplémentaire. La réponse est un non catégorique. Les clients ne dépenseront pas plus d'argent parce qu'ils peuvent faire leurs achats à d'autres moments. Ils étaleront leurs achats dans le temps, avec un effet financier négatif pour le détaillant : le même chiffre d'affaires et plus de coûts."
Toujours selon le SNI, de telles propositions ne vont pas faire revenir les clients qui ont pris l'habitude de faire des achats 24h/24 sur internet. "La question de savoir si les magasins physiques doivent s'y adapter pour rester rentables est discutable. Les clients qui choisissent de se rendre dans un magasin physique le font pour l'"expérience d'achat" et c'est là que réside le grand défi pour les détaillants."
Un avis qui résulte aussi de résultats obtenus suite à une enquête auprès de ses membres. "Une récente enquête menée auprès de nos membres a montré que 6 commerçants sur 10 considèrent que l'idée de garder le commerce ouvert jusqu'à 22 heures est une mauvaise idée. Le même nombre est contre la suppression du repos dominical (63 %). Aujourd'hui, les commerçants sont libres de choisir leurs heures d'ouverture entre 5 heures et 20 heures (ou 21 heures). 56 % ne pensent pas que ce soit une bonne idée de déplacer de deux heures pour que les heures d'ouverture se situent entre 7 et 22 heures."
En résumé, le SNI est contre une extension des heures d'ouverture et en faveur du maintien d'un jour de repos hebdomadaire et l'a fait savoir lors de l'audition au Parlement. "Car la liberté du consommateur n'est pas celle du commerçant", conclut le syndicat.