Rori, une popstar belge aux portes de l’enfer

L’auteure compositrice liégeoise sort un premier EP et enchaîne les prestations remarquées.

Rori, une popstar belge aux portes de l’enfer

Gröningen, à l’extrême nord des Pays-Bas, accueille fin janvier le plus grand festival européen consacré aux artistes émergents (Eurosonic). Dua Lipa, IDLES et quantité d’autres y ont effectué leurs premiers pas. Chaque année, les délégations nationales viennent donc y présenter leurs poulains au monde merveilleux de la musique (labels, bookers, agents, promoteurs,…), en espérant toucher du bout des doigts le graal d’une carrière internationale.

Il y a une petite quinzaine de jours, la Fédération Wallonie Bruxelles avait particulièrement fière allure, en débarquant avec de très beaux noms comme ECHT, Tukan, The Haunted Youth ou encore Lander&Adriaan. Mais il se murmure, qu’une autre artiste a marqué les esprits lors de sa performance : Camille, 24 ans, mieux connue sous le nom de RORI.

"Je suis la première surprise de tout cet intérêt", nous répond-elle timidement lorsque nous la rencontrons dans un café bruxellois. "J'ai la chance d'avoir pas mal de sollicitations alors que j'en suis à mes tout débuts". Aussi discrète à la ville que déchaînée sur scène, la chanteuse liégeoise a en réalité une belle petite expérience derrière elle.

À 16 ans, elle forme le groupe Beffroi avec son ami Valentin Vincent. Naturellement douée, la paire électro-pop perce rapidement, au point de se retrouver sur la scène du Botanique et de gros festivals comme Dour ou Les Ardentes. Mais Valentin décède en 2017 à l’âge de 20 ans des suites d’une maladie, mettant brutalement un coup d’arrêt à la carrière qui lui était promise.

Pour Rori, sensible et en lutte contre des tendances dépressives depuis l'enfance, ce drame aurait légitimement pu signifier la fin de l'aventure. Mais elle en décida autrement. "Quand mon meilleur ami est mort alors qu'il avait envie de vivre, explique-t-elle, j'ai compris qu'il n'y avait pas de sens profond derrière tout cela et qu'il fallait arrêter d'en chercher un. Et puisque la vie n'a pas nécessairement de sens, autant en faire ce que l'on veut. Ce jour-là, j'ai dit à ma mère : "Je vais continuer à faire de la musique".

Nettement moins tabou que par le passé, le sujet de la dépression est omniprésent, au risque d'être surmédiatisé pour les artistes qui l'évoquent. "J'en parle parce qu'il n'y a aucune honte à vivre avec" précise Rori. "Déjà, à l'époque, j'en parlais sans problème. Je suis née avec une maladie et je prends un médicament qui me fait me dire "je n'ai pas envie de mourir" (rires). Mais je n'ai pas envie d'être identifiée à cela. La chose la plus importante, finalement, c'est que ça n'empêche pas de se lancer dans plein de projets et d'arriver à ses fins".

Biberonnée à la scène rock du début des années 2000 (Arcic Monkeys, Strokes, Libertines,…) Camille est de retour avec une pop puissante et ultra-communicative, qui la rapproche d'une Billie Eilish ou une Olivia Rodrigo. "Docteur", son premier single publié mi-2022 illustre parfaitement cet état d'esprit et fait un tabac sur les ondes depuis sa sortie. La jeune fille introvertie s'est trouvé un alter ego scénique qui lui permet de s'évader, d'arrêter de penser, et, surtout, d'offrir des prestations intenses, qui élargissent encore un peu plus sa sphère d'influence. Les trois autres titres du EP Ma saison en enfer (Warner, sorti le 3 février) sont moins explosifs, mais d'autres titres bien rock'n'roll pourraient se frayer un chemin sur son futur album. En attendant, la voilà programmée aux Solidarités et aux Francofolies de Spa.

Vous êtes hors-ligne
Connexion rétablie...