Un féminin regard
Elle de Paul Verhoeven, qui a ponctué la compétition officielle du 69e Festival de Cannes, rejoint avec son portrait envolé d’une femme battante l’une des lignes de force des sections parallèles.
Publié le 21-05-2016 à 17h08 - Mis à jour le 21-05-2016 à 17h09
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Elle de Paul Verhoeven, qui a ponctué la compétition officielle du 69e Festival de Cannes, rejoint avec son portrait envolé d’une femme battante l’une des lignes de force des sections parallèles. Un Certain Regard, la Quinzaine des Réalisateurs et la Semaine de la Critique ont mis en évidence beaucoup d’histoire de familles, réelles, recomposées, fantasmées, et les questions liées à l’identité, l’appartenance ou la transmission. Mais qui dit famille entend aussi par allitération et par association femme. Et comme celle incarnée par Isabelle Huppert chez Verhoeven, celles-ci ont largement pris l’ascendant.
A la Quinzaine, le prix Art Cinema décerné à Wolf and Sheep récompense non seulement une réalisatrice afghane - double singularité. Mais ce film de Shahrbanoo Sadat s’appuie sur une légende séculaire, où un loup devient femme pour séduire un berger, qui traduit l’hypocrisie masculine : "c’est pratiquement une histoire érotique qui permet de contourner l’interdit religieux qui entoure tout ce qui a trait à la sexualité et la femme » nous expliquait la réalisatrice qui a dû affronter la misogynie culturelle jusqu’au sein de ses comédiens.
A la Quinzaine, toujours, l’une des révélations de l’année est Divines, premier long métrage de la Française Houda Benyamina qui cumulait les handicaps : femme, maghrébine, qui a dû les réserves des financeurs du cinéma après avoir surmonté le déterminisme de genre et social. Le résultat traduit sa vigueur morale, politique, artistique. Et la voix de ses jeunes comédiennes Oulaya Amamra, Déborah Lukumuena et Jisca Kalvanda (qui ont vraiment connu « l’école de la vie », au contraire que quelques stars pipolisées aux propos indécents) est aussi puissante et sagace devant que derrière la caméra.
A la Semaine de la Critique, une autre réalisatrice française prometteuse, Julia Ducournau, a imposé son Grave, film (doublement) de genre où l’entrée dans l’âge adulte d’une jeune fille s'incarne par une mue mordante. Si la réalisatrice entend se distancier de toute analogie féministe - trop réductrice à ses yeux - elle assume néanmoins la caractère éminemment féminin de son film.
On n’oublie pas qu’en compétition l’Allemande Maren Ade a pris l’ascendant avec Toni Erdmann, révélant aussi à l'international son actrice Sandra Hüller. Mais au contraire de ses très timorés réalisateurs français, on s’étonne vraiment a posteriori que Thierry Frémaux ai confiné au Certain Regard La Danseuse de Stéphanie Di Giusto ou Voir du Pays de Delphine et Muriel Coulin, des oeuvres aux lectures multiples, qui parlent avec profondeur et au-delà des stéréotypes de la condition de la femme d’hier comme d’aujourd’hui. Avec Soko en trait d’union, les deux films ont également mis en avant Lily-Rose Depp - qui peut prétendre se faire un prénom - et Ariane Labed.
Autant d’oeuvres qui, comme diraient les filles de Divines, "ont du clito".