"Magnette a été contaminé par les méthodes de Bouchez"
Le président Paul Magnette est très offensif médiatiquement et cela déplaît, y compris au PS.
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- Publié le 19-11-2021 à 06h37
- Mis à jour le 19-11-2021 à 08h59
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Depuis plusieurs semaines, Paul Magnette mène une offensive médiatique. Il semble que la stratégie du PS soit de faire entendre sa voix dans tous les dossiers fédéraux, ou presque. Cette semaine, le président socialiste a agacé ses partenaires de la majorité Vivaldi en prenant le contre-pied d’une décision du kern visant à sanctionner le personnel soignant non vacciné. Une décision qui, pourtant, avait été validée au préalable par le vice-Premier PS, Pierre-Yves Dermagne.
Le double impératif du PS
Cette attitude du PS au sein de la coalition a pris corps cet été, lorsque les ministres socialistes du gouvernement De Croo ont mis leur démission dans la balance. Si une solution n'avait pas été trouvée pour les grévistes de la faim de l'église du Béguinage à Bruxelles, ils auraient fait tomber le gouvernement. Depuis lors, Paul Magnette a multiplié les expressions fortes : pensions, nucléaire (" Les centrales fermeront, le débat est clos "), mobilité (" gratuité totale " des transports en commun)…
Les raisons de cette volonté farouche de marquer l’actualité sont connues. Le PS est pris par un double impératif : il lui faut exister par rapport au PTB qui lui fait concurrence à sa gauche et donner le change aux autres partis francophones dans la guerre pour le leadership en Wallonie (face au MR) et à Bruxelles (face à Écolo et au MR). Plus particulièrement, l’omniprésence du président libéral, Georges-Louis Bouchez, sur tous les sujets brûlants du moment, pousse les socialistes à ne pas lui laisser le champ libre dans la presse.
Une "bouchéisation" ?
Mais la réponse tactique apportée à ces enjeux réels qui pèsent sur le PS laisse sceptiques certains de ses élus. Les mécontents ne se sont pas (encore ?) fait entendre en bureau de parti mais, en coulisses, des voix commencent à s'exprimer. " Mon impression, c'est que Paul se 'bouchéise', il a été contaminé par les mauvaises méthodes de Georges-Louis Bouchez . Comme lui, il réagit désormais tous azimuts et, à la fin, il n'en reste que du bruit" , confie un parlementaire PS.
Cette "bouchéisation" supposée ne correspond pas à l'image fiable que doit donner le PS, ajoute notre source. " Paul gagnerait à être davantage dans la sérénité, le sang-froid. Cette politique à la mode Twitter ressemble à du football panique. Cela commence à gêner un peu, en interne. Il est légitime et même nécessaire pour le parti de faire connaître sa ligne mais le PS, qui est un parti gestionnaire, sérieux, doit veiller à refléter cette image. Notre ADN n'est pas respecté. Paul est aussi à contre-emploi, lui qui est un homme de discours, un homme d'arguments, pas un agitateur. "
"Une demande des mandataires"
Un autre socialiste nuance : " Je pense que l'attitude de Paul Magnette est également une réponse à la demande des mandataires de le voir apparaître davantage au nom du parti ." Dans une majorité fédérale composée de sept partenaires, chaque formation doit parler plus fort si elle veut se faire entendre. Le PS doit montrer qu'il pèse quelque chose au sein d'une coalition bigarrée politiquement et accueillant en son sein la "droite libérale" (MR et Open VLD).
" On est pris dans une dialectique où le PS ne peut pas laisser Bouchez se répandre impunément dans les médias. Mais, à trop vouloir contrer notre ennemi - le MR -, on finit par sembler faible vis-à-vis de notre adversaire - le PTB ", estime un autre socialiste.
"Une politique de la terre brûlée"
Au sein de la majorité fédérale, comme on peut l'imaginer, cet activisme médiatique du PS dérange. À commencer par… le MR. " On a reproché beaucoup de choses à Georges-Louis, mais le double visage et la politique de la terre brûlée affichés par le PS prend une ampleur inédite , analyse un observateur libéral. Le PS fait entrer les affrontements des présidents de parti dans le gouvernement lui-même. "
Les libéraux francophones s'interrogent sur le but poursuivi par le PS, qui est pourtant en partie une réponse à l'activisme de Georges-Louis Bouchez. " Quel est l'agenda des socialistes ? Ils n'obtiendront rien électoralement avec des promesses intenables. Et ils fragilisent le gouvernement De Croo… "
"Un désaveu pour Dermagne"
Chez Écolo, autre partenaire "vivaldien", certains voient dans la combativité de Paul Magnette au fédéral une forme de désaveu de Pierre-Yves Dermagne, le chef de file des socialistes au sein de l'équipe d'Alexander De Croo. " Quand j'entends le débriefing des interventions de Pierre-Yves Dermagne en kern et que je les compare avec la teneur des positions du PS dans la presse, il y a un fossé. Le PS a peut-être besoin d'un mégaphone médiatique pour se faire respecter ", estime un écologiste qui compte.