L'Horeca ne digère pas l'arrivée du CST : "On nous prend pour des policiers que nous ne sommes pas"
Le Covid Safe Ticket entre en application ce vendredi à Bruxelles pour une durée de trois mois. Les secteurs concernés ne sont pas tous fin prêts à contrôler.
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- Publié le 14-10-2021 à 21h02
- Mis à jour le 15-10-2021 à 09h43
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"C'est pas vrai ! Dites-moi que c'est une blague", s'exclame Nour en se tenant la tête. "Salman, appelle le patron", lance-t-elle, en arabe, en s'adressant au serveur qui pose rapidement deux verres de thé aux clients avant de dégainer son smartphone, l'air paniqué.
Visiblement, dans ce salon de thé situé au cœur des Marolles, l'application du Covid Safe Ticket (CST) dès ce 15 octobre est une surprise. "Moi je croyais que ces histoires étaient réglées, pas que ça commençait demain. Au début, on disait que le vaccin n'était pas obligatoire, maintenant on impose des mesures qui ressemblent à une obligation cachée. Ça n'a pas de sens", poursuit Nour, à la fois irritée et inquiète.
Elle jette un œil vers la salle presque pleine. "Les habitués refusent de se faire vacciner. Et qui je suis, moi, pour leur imposer quoi que ce soit, c'est pas mon job."
Geneviève, cliente habituée du marché aux puces, juste en face, s'invite dans la discussion. "Moi, c'est pas compliqué, j'irai en terrasse, m'en fiche du froid. Et me demandez pas si j'ai le vaccin, c'est pas vos oignons." Nour de poursuivre : "Quand c'est plein le week-end, et qu'on est deux à tout faire en salle et en cuisine, qui se chargera de contrôler ? Et le monsieur qui est là, à partir de demain, je vais lui dire quoi", interroge Nour, dépitée, en indiquant un SDF qui fréquente souvent l'établissement.
L’appli CovidScan testée à l’avance
À la taverne du Petit Lion, un peu plus loin, clients et tenanciers sont, eux, bien au courant de l'application du CST. Tout le monde semble même déjà prêt. "Je viens, à l'instant, de télécharger l'appli CovidScan. Là, je vérifie avec les gens si tout est OK", explique le barman.
"Le Petit Lion est à la pointe de la technologie", lance en souriant Jean, un fidèle client. L'homme joue le jeu et tend son smartphone pour que soit scanné son QR code. Il passe au vert, Jean est fier. "Je suis un homme prévoyant, moi, Madame. Je suis vacciné depuis le mois de mai. Par contre, j'avoue que je trouve ça ridicule. Je me plie aux réglementations, mais c'est ridicule. C'est un vecteur d'inégalités, d'exclusion. Surtout dans un quartier populaire comme le nôtre où tout le monde n'est pas vacciné."
"Qu’ils mettent des policiers à l’entrée"
En bas de la rue, Vanessa et Bruno, propriétaires d'un bar à vin assez huppé, partagent cet avis. "Ridicule et même injuste", selon le couple qui refuse d'ailleurs de contrôler les clients.
"On va s'acheter des képis, tourner le truc en dérision. Parce qu'on nous prend pour des policiers que nous ne sommes pas. Nous n'avons pas à contrôler les gens ni à nous immiscer dans leur vie médicale."
Le couple n'est pas opposé aux mesures en place, mais bien au contrôle imposé aux clients. C'est pourquoi une pancarte sera installée à l'entrée du bar pour indiquer qu'il faut présenter le CST. "Si les gens montrent le pass spontanément, très bien. Mais nous, on ne contrôlera rien."
Que se passera-t-il en cas d'amende ? "On contestera devant la justice. L'Horeca en a plein le dos. Ces règles discriminatoires, ça sera sans nous. Ou alors, chaque fois qu'on doit refuser un client, que le gouvernement nous paie la différence. Ils veulent des contrôles ? Qu'ils mettent des policiers à l'entrée", conclut le couple, visiblement courroucé, mais "prêt pour la révolution".