ING et Record Bank : 3.158 emplois menacés en Belgique ; appel à la grève
Une restructuration majeure était redoutée chez ING Belgique. Ce lundi matin, c'est le choc au sein du personnel de la filiale belge du géant néerlandais. 3.158 emplois sont menacés à l'horizon 2017 à 2021. Les syndicats assimilent ces chiffres à une "déclaration de guerre".
Publié le 03-10-2016 à 07h20 - Mis à jour le 03-10-2016 à 16h34
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Une restructuration majeure était redoutée chez ING Belgique. Ce lundi matin, c'est le choc au sein du personnel de la filiale belge du géant néerlandais. Lors d'un conseil d'entreprise, qui a débuté sur le coup de 7 heures dans le cadre de la procédure Renault, le couperet est tombé: au total ce sont 3.158 emplois qui sont menacés à l'horizon 2017-2021 (en ce compris Record Bank). Cela représente 40% des effectifs actuels d'ING en Belgique.
En outre, ING a annoncé que "un maximum de 1.700 employés pourraient être licenciés". "Prenant en compte les 350 départs naturels déjà enregistrés en 2016 au sein d'ING Belgique, ING Belgique utilise dans ses discussions avec les partenaires sociaux une réduction de 3.150 équivalent temps-plein d’ici à 2021."
La direction affirme qu'elle prévoit des réductions de coûts de l'ordre de 900 millions d'euros annuels d'ici 2021.
C'est donc un nouveau séisme social que la Belgique est en train de vivre aujourd'hui, quelques semaines seulement après l'annonce de la fermeture de l'usine de Caterpillar à Gosselies.
Le réseau d'agences d'ING devrait, lui aussi, être profondément transformé. On estime que 600 agences devraient à terme disparaître.
La banque dit devoir s'adapter en fonction d'un environnement complexe, caractérisé par des taux très bas et une digitalisation croissante de ses métiers.
Au total, la restructuration mondiale au sein du groupe ING emportera 7.000 emplois, où la Belgique, on l'a vu, sera très fortement touchée. Sur son marché national, aux Pays-Bas, ce sont 2.300 emplois qui devraient passer à la trappe.
"Déclaration de guerre"
Le front commun syndical va appeler le personnel de la banque à interrompre le travail dès lundi. Une grève est attendue pour vendredi. Les syndicats vont privilégier un "mouvement émotionnel" lundi. "Chaque membre du personnel, en agence ou dans un des sièges de Gand, Namur ou Bruxelles, va être invité à rentrer chez lui", a indiqué Nicolas Dinsart, porte-parole du SETCa zone Sud. "Nous appelons à faire grève vendredi et nous ne participerons en outre pas aux différents conseils d'entreprise prévus cette semaine", a-t-il ajouté.
Les syndicats assimilent les chiffres de restructuration à une "déclaration de guerre". "Tant que l'on fera croire à l'opinion publique que la seule variable d'ajustement c'est la masse salariale et les emplois, on subira ce genre de massacre social. L'alternative pourrait être de moindres prétentions pour les dividendes ou un saut de dividendes", nous explique Anetta Verstraten, syndicaliste à la CNE.
"Il est encore un peu tôt pour déterminer combien de licenciements secs ou de plans de fin de carrière seront envisagés", a commenté Philippe Samek (CNE), guère surpris par l'annonce. "Ce n'est pas le début. Il n'y a qu'à voir tout ce qui se passe dans le secteur de la finance." "Il faut reconnaître que nous sommes à la croisée des chemins avec un changement de culture et une part de plus en plus importante de la digitalisation", a-t-il ajouté.
Etant donné le côte imbuvable de ce plan sur le plan social, les syndicats entendent évidemment s'opposer à son contenu. Mais quelle sera leur marge de manœuvre? Et leur stratégie? Il est trop tôt pour le dire mais les syndicats avancent qu'étant donné la longueur de la procédure Renault en cours, ils ont un temps "pour se positionner". Une longue, une très longue phase d'information, puis de négociation sociale va donc s'ouvrir, une fois le choc de l'annonce passé. Une période assurément très tendue.
Précisons que ce plan chez ING Belgique s'inscrit dans une restructuration plus large qui touchera également d'autres pays.
Rik Vandenberghe: "Une décision difficile mais nécessaire"
"C'était une décision extrêmement difficile car nous sommes conscients de son impact sur nos équipes mais elle était nécessaire pour assurer l'avenir de la banque", a affirmé Rik Vandenberghe, l'administrateur délégué d'ING Belgique, alors qu'ING a annoncé lundi matin, au cours d'un conseil d'entreprise extraordinaire, son intention de supprimer 3.500 équivalents temps plein (ETP) d'ici la fin de 2021. "J'ai mal dormi ces dernières nuits et mes premières pensées, aujourd'hui, vont vers les travailleurs d'ING", a poursuivi son responsable en assurant que le groupe "prendra ses responsabilités" pour engager avec les syndicats un dialogue "transparent et ouvert".
"Nous sommes et nous voulons rester une banque saine mais nous devons faire face à de très nombreux défis", dont des taux bas, une numérisation croissante, une concurrence toujours plus rude et un changement de comportement de la part des consommateurs, a encore expliqué Rik Vandenberghe.
"Dans ce contexte, nous avons dû réfléchir à comment faire face et développer un projet capable d'assurer la pérennisation de nos activités", a-t-il ajouté. A l'issue de plusieurs mois de réflexion, le groupe est finalement parvenu à un plan de transformation prévoyant, entre autres, "des économies d'échelle via une plate-forme intégrée unique entre la Belgique et les Pays-Bas ainsi qu'une nouvelle manière de travailler, plus agile et moins hiérarchisée offrant davantage d'autonomie aux salariés".
"Nous allons combiner ce qu'il y a de meilleur en Belgique et aux Pays-Bas afin de devenir une banque de premier plan pour 11 millions de clients au Benelux. Il s'agira notamment de partager une infrastructure informatique et opérationnelle unique et d'harmoniser les produits et services d'un point de vue commercial", a détaillé le CEO.
La banque, qui annonce un investissement supplémentaire de 450 millions d'euros, entend surtout réduire ses coûts de 550 millions d'euros et supprimer, dans tous ses secteurs, 3.500 ETP d'ici la fin de 2021. Le nombre de licenciements secs, lui, atteindrait un maximum de 1.700. "En tenant compte des 350 départs naturels déjà enregistrés en 2016 au sein d'ING Belgique, nous discutons, avec les syndicats, d'une réduction de 3.150 ETP", a précisé à ce sujet l'administrateur délégué.
Quant au nombre d'agences, il serait réduit de près de la moitié, à 650 agences "plus grandes, avec davantage de personnel et des heures d'ouverture plus étendues". Enfin, ING Belgique intégrera dans sa structure les activités de Record Bank, dont le nom disparaîtra. "L'objectif, c'est de rester visible dans la rue. Nous avons estimé à 650 le nombre d'agences nécessaires pour continuer à servir nos clients", a résumé Rik Vandenberghe selon qui, par ailleurs, "aucune autre intention de transformation n'est actuellement sur la table".
"Parvenir à cette décision extrêmement difficile a pris des mois, une période au cours de laquelle nous avons examiné différentes possibilités. Finalement, le couperet est tombé la semaine passée et nous avons communiqué le plus rapidement possible", a enfin rappelé le responsable. "C'est un projet nécessaire car le monde change. Nous avons donc décidé de regrouper nos forces et de prendre notre destin en main", a-t-il conclu.
La Région bruxelloise demande d'appliquer l'accord sur la mobilité des chercheurs d'emploi
La Région bruxelloise sollicitera dans les prochains jours les ministres et acteurs wallons et flamands de l'Emploi et de la Formation professionnelle pour constituer une cellule de crise afin d'établir un plan d'urgence social de reclassement de travailleurs victimes d'un licenciement collectif, en application de l'accord de coopération de 2005 concernant la mobilité interrégionale des chercheurs d'emploi, a indiqué lundi en début d'après-midi le ministre bruxellois de l'Emploi et de l'Économie, Didier Gosuin (DéFI). Cet accord de coopération a été signé par toutes les Régions et Communautés à la suite de la faillite de la Sabena. Son objectif: coordonner les actions et les intervenants pour assurer une reconversion aux victimes attendues.
Selon Didier Gosuin, Bruxelles risque d'être particulièrement touchée puisqu'elle est le siège des entreprises bancaires qui occupe quelques 30% de Bruxellois. "En tant que ministre de l'Emploi et de la Formation professionnelle à Bruxelles, je souhaite mobiliser sans tarder tous les acteurs publics autour de la situation d'ING mais avec une vision incluant les autres entreprises du secteur bancaires qui vont ou pourraient suivre le même processus", a commenté le ministre bruxellois de l'Emploi.
A ses yeux, la combinaison, au sein du secteur bancaire, de la mutation numérique et digitale et du recours au facteur humain comme seule variable d'ajustement pour réduire les coûts donne "un résultat effroyable en matière d'emploi".
Dans ce cas, comme d'autres, la procédure de la Loi Renault est enclenchée. Sans tirer de conclusions hâtives, il va falloir attendre l'issue des négociations entre la direction d'ING et les interlocuteurs sociaux mais ce seront, sans doute, les leviers habituels qui seront actionnés, a encore dit le chef de file de DéFI au gouvernement bruxellois.
"Nous ne resterons pas dans l'inaction en attendant la phase de notification du licenciement collectif. Si le secteur fait face à sa restructuration, nous devons penser aux membres du personnel concernés", a conclu Didier Gosuin.